BD : Luc Leroi - T08 : Plutôt plus tard

Auteur : Denis
Editeur : Futuropolis

L’anti-héros Luc Leroi, dont les péripéties faisaient partie des “meubles” du mensuel (A SUIVRE) durant les années 1980 et ’90, est de retour. Voilà qui donne l’impression de recroiser un bon copain qu’on aurait perdu de vue. Mais… mon introduction de chronique ne donnerait-elle pas d’emblée l’impression que cette bande dessinée ne s’adresse qu’aux tempes grisonnantes et aux fronts dégarnis ? Soyons francs : il n’y a pas ici de quoi faire jubiler le lectorat des Légendaires. Par contre, il y a souvent chez Jean-Claude Denis une subtilité hors des modes qui se cache derrière la façade de sa ligne claire classique

Comme d’habitude, les psychologies des personnages sont fouillées, les dialogues savoureux, l’humour doux-amer, les situations loufoques, avec un ancrage dans le quotidien et dans la culture. Le présent album présente même un voyage temporel dans l’Histoire de l’Art et à la rencontre de Paul Gauguin... qui n'est pas sans évoquer le Midnight in Paris de Woody Allen. Maintenant que j’y pense, on peut sans mal dresser un parallèle entre le public qui lit Jean-Claude Denis et celui du génial cinéaste binocleux.

Si sa huitième aventure surprend agréablement, Luc Leroi, lui, n’a pas vraiment changé : simultanément attachant et agaçant, sans le sou et maladroit, érudit au grand coeur et positif. Il s’avère aussi particulièrement touchant dans sa relation sentimentale avec la belle Alinéa, polynésienne éprouvant le mal du pays. 

La narration de l’album est finement ciselée, tellement fluide qu’on glisse avec le protagoniste  dans ses rêveries et sa perte de repères. L’auteur nous fait voyager entre la grisaille parisienne, la douceur des îles du Pacifique, entre deux siècles... sans besoin de tout expliquer. Laissez donc déstabiliser votre cartésianisme pendant quelques minutes.

Un divertissement aussi plaisant qu’intelligent, avec en bonus une impulsion de redécouvrir l’oeuvre de Gauguin… voire même de raviver notre propre poésie anti-fatalisme.