Editeur : Drugstore
Derrière son sobre classicisme de façade, l’art de Jean-C. Denis se révèle véritablement à la lecture de ses récits, souvent brillants. Fin observateur du quotidien et des petits travers de ses contemporains, imaginant les rencontres les plus cocasses, les pimentant de dialogues concis, l’auteur fait à présent partie de ceux que l’on suit de près, avec un plaisir toujours renouvelé... même quand il s’agit de redécouvrir les productions antérieures à ses plus grandes réussites (que sont, par exemple, Le sommeil de Léo en 2007, ou Nouvelles du monde invisible en 2008*). Datant du début des années ’90, les livres L’Ombre aux tableaux, Bonbon Piment et Le Pélican sont réédités et compilés dans le présent ouvrage.
Le premier (en 1991 chez Albin Michel, pour l'édition originale), probablement le plus abouti, raconte le surprenant parcours urbain d’un homme, amoureux transi et artiste méconnu, dont les toiles se feront connaître par une suite de circonstances surprenantes… pré et post-mortem.
Les trois récits suivants composaient précédemment l’album Bonbon piment (1991, Albin Michel). La nouvelle au titre éponyme, ainsi que Le jeu des animaux et Maï pen raï, se déroulent dans un contexte plus exotique : chacune est une histoire d’amour entre un européen et une autochtone de Thaïlande ou de La Réunion. Illusions et jalousie désespérée, différences culturelles ou rendez-vous manqué, ces (trop) courtes aventures sentimentales s'avèrent douces-amères ou tragiques.
Dans Le Pélican (première édition en 1994, chez Albin Michel), on retrouve un récit plus long et l’ambiance parisienne. Suite à un incendie, Lhoste, chômeur, connaît dès lors une situation temporairement plus précaire encore. Trouvant refuge dans un bistrot aux étranges habitués et, pour se loger, l’appartement d’un gardien de nuit aux horaires inverses aux siens, la vie semble basculer Lhoste dans un microcosme relationnel de plus en plus décalé. Le plaisir de l’auteur à créer cette galerie de personnages foldingues aussi inquiétants qu’attachants est très perceptible.
Sans être absolument indispensable, la diversité de tonalités narratives dans ce beau recueil permettra à chaque lecteur de Jean-C. Denis d’y trouver son bonheur.
Chronique collective de la rédaction Asteline
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