BD : Animal'z

Auteur : Bilal
Editeur : Casterman




Un monde passé à la moissonneuse batteuse des dérèglements climatiques, occasionnant multitude d’autres désastres. Un monde morcelé où seul subsiste un "chacun pour soi" cruel. Un monde d’océan gris glacé ou de terre aride ponctuée d’éoliennes et d’épaves. Et dans ce monde, des rescapés qui tentent de gagner par voie maritime les hypothétiques "eldorados" pouvant offrir un ultime espoir de survie.

Entrent alors en scène des humains ayant subi des métamorphoses (volontaires ou non) liées à des expériences de laboratoire.
La phrase suivante, prononcée par un des protagonistes, semble résumer l’obsession d’Enki Bilal sur le thème de l’hybridation homme-animal : "L’arrogance scientifique qui en est l’origine me déplaît, mais la décadence qui s’y cache m’attire." L’auteur poursuit en effet l’exploration de son univers très personnel, en poussant l’atmosphère de désolation jusqu’à son comble… pour aboutir à un récit qui ressemble finalement plus à un étrange western qu’à un stéréotype de science-fiction. L’absence totale d’aspect politique et d’organisation sociale y est pour beaucoup.

Dense - et parfois ardu - dans sa narration, Animal’z sonne pourtant juste dans une réflexion aussi artistique que philosophique sur les conséquences possibles de notre époque en pleine désorientation. Animal’z se pose aussi comme une allégorie, celle de l’adaptation de notre espèce, d’un pacte tacite avec le monde animal et la nature.


Niveau dessin, Bilal nous sert son style en crayonné (rehaussé de pastel) et c’est splendide… L’usage du blanc, noir et des orangés sur papier gris constitue un nouveau choix formel mais ne crée pas de réelle surprise graphique pour ses lecteurs habituels. Par contre, une épuration supplémentaire (presque extrême) de son style - autrefois si chargé en détails et hachures – semble préparer une nouvelle étape dans la bibliographie de l’auteur. Une évolution logique, réussie, que nous pressentions déjà dans la longue et très intéressante interview qu’il nous avait accordée en terminant La tétralogie du Monstre (cliquez ICI, ça en vaut la peine !)

Un bien bel album, d’autant plus appréciable que, pour la première fois depuis longtemps, le récit s'achève au bout d'un seul volume.
Chronique par Jean Alinea

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