Un pan entier de la bande dessinée européenne cherche
à changer de visage, à "performer", à s’inscrire dans un modèle
économique plus concurrentiel par rapport à ses homologues américains et
nippons !
Prenez un expert en découpage -
Balak -, un dessinateur issu du dessin animé - Michaël Sanlaville (à qui
on devait aussi la BD Le Fléau Vert) - et puis, aux couleurs (seulement
?), Bastien Vivès, le jeune prodige désormais connu pour Le goût du chlore, Polina ou
autres*. Voilà trois talents en vogue, se
donnant pour l’occasion une image très "groupe de rock", produisant
au rythme effréné d’un studio de mangas japonais et qui bénéficient
d’un marketing très soutenu de leur éditeur.
En "bonus" de la première édition, vous trouvez des autocollants "collector". En
postface de l'album, vous avez droit à un petit journal de bord
humoristique qui confirme – si besoin était – l'investissement sur les plates-bandes très convoitées du manga. Pour la dynamique de lancement, les auteurs s'improvisent acteurs pour une vidéo cinématographique sur YouTube. Et pour couronner le tout, vous avez la promesse que le rythme de parution de la série sera soutenu. Toutes les attentes des lecteurs sont censées être comblées. Toutes ?
Si on gratte le vernis marketing, qu’en est-t-il du fond dans ce premier album de Last Man ? Je
dirais que ni le titre, ni la couverture, ni la forme ne mentent sur la
marchandise : ne cherchez pas ici l’originalité mais du passe-temps
aussi efficace que potache. Du "shonen à la française" dont le seul signe
distinctif serait la patte graphique de Sanlaville (qui singe parfois
celle du copain Vivès).
C’est dans un monde imaginaire, vaguement
médiéval et à peine esquissé, que se prépare l'organisation d'un
giga-tournoi, dans lequel s’opposeront des équipes issues de différentes
disciplines de lutte, à grands renforts de super-pouvoirs. Vous avez dit
"cliché" ? La succession de personnages qui nous sont présentés ne l'est pas moins :
Adrian est un attachant gamin de douze ans, aussi ambitieux que fragile, souffrant de ne pas être doué en sport de combat. Mais surgit
d'on-ne-sait-où un partenaire inespéré, Richard, un bellâtre costaud,
solitaire, épicurien et qui a des vues sur sa mère, Marianne. La belle jeune femme est également courtisée par Maître Jansen,
le professeur de son fils, élégant homme d’âge mûr, mais ridicule et
maladroit en amoureux éperdu. Parmi les adversaires de tournoi, on
trouvera une équipe de la même école qu’Adrian, dont fait partie la jolie
Elorna qui ne laisse pas ce dernier insensible, ou encore un duo qui
ressemble à s’y méprendre aux frères Bogdanov.
Quelques répliques
cinglantes et autres retournements de situation font que le tout se
laisse lire agréablement… et oublier. Si vous avez vraiment de
l’argent et du temps en trop, pourquoi pas Last Man. Mais je ne saurais
jamais assez vous recommander d’autres parutions beaucoup plus
intéressantes, tout aussi passionnantes et moins creuses, qui défilent
(trop vite) sur les étals des libraires.
Chronique par Jean Alinea
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