BD / HUMOUR : Chacun son chat

Auteur : Geluck
Editeur : Casterman

Se réveillant en sursaut, le Chat s'exclame : 
"

J’ai fait un horrible cauchemar : je rêvais que j’étais tombé dans la facilité." 
Ce à quoi sa femme lui rétorque : 
“Ca ne t’arrivera pas, je te ferai piquer avant."



Voilà une bonne note d'auto-dérision face à la crainte de la répétition, bien légitime au bout de tant d'albums. Pourtant, après des expérimentations de forme et de fond dans La Bible selon le Chat et Le Chat fait des petits, ce 21e tome, intitulé Chacun son chat, signe le retour à un album "classique". Un de plus donc. Développées en une image, en un strip ou en une planche, les idées semblent livrées en vrac et auraient gagné  - une fois de plus aussi - à être mieux triées. 

Mais Philippe Geluck a autant de talent que le sens des affaires : ce tri entre le grain bien piquant et l'ivraie fort plate s'effectuera probablement à l'occasion d'un futur opus de la série Best Of du Chat. 

C'est pourtant toujours un plaisir de lire ses nouveaux aphorismes et mots d'esprit... de plus en plus acerbes, sans concessions. Ne fait-il d’ailleurs pas dire à son célèbre félin : “je suis un humaniste qui ne se fait plus aucune illusion sur la race humaine”Extraits : 

"Avec le mariage forcé pour des gamines de 8 ou 9 ans, au moins, la crise d’adolescence ne sera pas pour les parents, mais pour le mari. Bien fait pour sa gueule."

"Si on arrive à faire croire à des cons que la corne de rhinocéros râpée est vraiment aphrodisiaque, il ne devrait pas être hyper compliqué de leur faire gober que la poudre de testicules séchés de braconnier est mille fois plus efficace."

"La guerre, ça a toujours été des pauvres qui tuaient d’autres pauvres. Tandis qu’avec le djihad, ce sont des pauvres cons qui tuent des pauvres gens."

"Les femmes ont voulu être l’égale de l’homme. C’est fait. Après, elles voudront être l’égale du handicapé, pour avoir des places de parking. Ca ne s’arrêtera jamais."

Geluck n’omet pas non plus l’héritage surréaliste dans ses gags :


"Une mouche qui est réincarnée en baleine, ça doit lui faire bizarre au début. Après, quand elle nage sur le dos, sous la banquise, ça lui rappelle le temps où elle marchait sur les plafonds."

"Chez les poissons, il y a un proverbe qui dit : si tu passes à côté de l’hameçon une fois, tu vivras un jour ; si tu apprends à éviter les hameçons, tu vivras toute ta vie."

L'humoriste belge rebondit aussi encore et toujours avec bonheur sur certaines évidences :



"Est-ce qu’on peut être imbu de quelqu’un d’autre que de soi-même ?"

"Un oiseau qui meurt, il tombe par terre, et là, il se fait manger par des vers. Or des vers, il en mangé toute sa vie. C’est comme si nous, après notre mort, on se faisait manger par des salades de tomates ou des mousses au chocolat."

"Certains provoquent la joie quand ils arrivent, d’autres quand ils s’en vont. Mais peu importe, au fond : l’important n’est-il pas d’apporter la joie ?"

Si ce volume n'est pas le plus indispensable, il y a de quoi rester reconnaissants envers Philippe Geluck de parvenir encore à nous faire sourire... et parfois rire.


Chronique par Joachim Regout