![]() Editeur : Cornélius
A lire ses livres, Stéphane Blanquet a du avoir une enfance débordante de rires et de joie (ceci est une antiphrase). Il n’y a qu’à voir le titre des fanzines qu’il a publié ou dans lesquels il a publié : Chacal puant, La monstrueuse, Mille putois, United Dead Artists…
Comme un Charles Burns (Black Hole, Big Baby) ou David Lynch mais en version gore et faussement naïve, Blanquet, 34 ans, n’a pas quitté l’univers de l’adolescence, qu’il semble revivre en cauchemars permanents.
Dans La vénéneuse, Blanquet reprend l’univers noir et blanc d’un de ses précédents one-shots, le très remarqué La nouvelle aux pis. Un noir et blanc radical, puisque tout le récit est un théâtre muet d’ombres chinoises, du genre à vous plonger dans une ambiance de contes de fées glauquissimes, sans morale, sans filet, sans "happy ever after". Si La vénéneuse était un conte de fée, les trois petits cochons auraient fini en boudin. Une Cendrillon adolescente et nymphomane transformerait une paire de petits Princes Charmants en objets sexuels.
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On ne peut qu’admirer la performance artistique et la puissance de la noirceur qui en ressort. En débarquant dans cet univers, vous devrez vous habituer à un style extrêmement original, tant du point de vue graphique que narratif. Vous mettez un certain temps à en trouver les codes, à différencier les personnages, et plus de temps encore à vous rendre compte que l’album fonctionne comme un puzzle narratif que vous ne reconstruirez qu’au bout de la troisième ou quatrième lecture. A ce moment, le cauchemar vous tournera dans la tête, sans début ni fin, comme un ruban de Möbius.
Sadique, étrange, provocateur et envoûtant, La vénéneuse est une œuvre forte, peut-être même un chef d’œuvre. Ceci dit, personnellement, il y a des gens dans la tête desquels je n’aimerais pas me retrouver, et Blanquet en fait partie.
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