BD : Les Sauvages

La famille Frey a emménagé près de Sarlat depuis un an, c'est le printemps 2019. Tonte de pelouse, cueillette de fruits avec les enfants, Joanne - l'ainée - et Benjamin. On n'en a jamais fini avec toute cette nature qui pousse, qui pousse !

Joanne, comme beaucoup de petites filles de son âge, est très câline avec son papa, même si l'arrivée de l'adolescence se fait déjà sentir. Avant qu'elle ne passe définitivement à ce stade, Julien voudrait réaliser son rêve de voir des animaux sauvages. Son ami biologiste, Johan Michaux, doit justement bientôt partir en Indonésie, à Sumatra, accompagné de Chloé, étudiante préparant un doctorat sur les éléphants. Le grand départ se fait en février 2020. La Covid est en train de se répandre dans le Monde, mais la France se croit encore à l'abri.

Ce roman graphique prend alors la forme d'un voyage initiatique pour Joanne et Julien. La première grandissant en découvrant le monde tel qu'il va, le second apprenant à voir sa fille s'affranchir de lui. En même temps qu'eux, nous découvrons l'immense biodiversité de l'archipel (17% de la faune mondiale !) Et comme partout, en Indonésie certains essayent de préserver ce trésor, pendant que le système économique entraine sa destruction. Les forêts sont sacrifiées pour construire des habitations, ou pour planter des palmiers et fournir ainsi en huile la demande exponentielle mondiale (alimentation et biocarburant entre autres). Certaines espèces disparaissent à cause de la perte de leur biotope originel, d'autres pour être traquées pour leurs vertus prétendûment "médicinales"... sans oublier l'impact des déforestations dans la prolifération de pandémies. Afin d'éviter l'ennui par afflux d'information, Julien Frey et Nadar ont opté pour de courtes séquences explicatives préfigurant le futur exposé prévu par Joanne.

Formellement, Les Sauvages est une belle BD, au dessin agréable, coloré directement et qui rejoint la désormais longue liste d'ouvrages qui dénoncent la folie destructrice des humains contre le Vivant, stimulée par le capitalisme. Outre l'hommage rendu à la nature, son mérite est de s'attarder sur une zone spécifique de la planète et de prôner une transmission intergénérationnelle, ici de père à fille. Ce n'est déjà pas si mal, mais un peu tiède vu l'état d'avancement du réchauffement climatique, de la pollution et de la 6e extinction de masse qui nous menace directement.

Chronique par Reynald Riclet

BD parue chez Futuropolis