Editeur : Plon/Kero / Pocket
Cela est dit en
quatrième de couverture, Le philosophe qui n'était pas sage est "une
histoire surprenante qui cache une subtile remise en cause de notre
société". Malheureusement, les mots "cache" et "subtile" semblent de
trop car l'intention de l'auteur est claire et la remise en cause tout
sauf subtile...
Sandro est professeur de philosophie dans une
université new-yorkaise. Dévasté par la mort de son épouse, disparue
lors d'un voyage en Amazonie un an plus tôt, il n'est toujours pas
parvenu à reprendre pied et presque l'ensemble de ses valeurs semblent
remises en question de façon fondamentale. Animé par l'esprit de vengeance,
il se lance, malgré toutes ses phobies et sa fragilité d'homme urbain,
sur les traces d'un peuple indigène de la forêt tropicale à qui il fait
porter la responsabilité de son malheur. Il est bien décidé à leur
pourrir la vie et, pour ce faire, il achète l'aide de guides un peu
mercenaires sur les bords. Arrivé à destination, il prend bien garde de
ne pas entrer en contact avec les membres du petit village et laisse à
Markus, le chef de la bande, mettre en œuvre son plan machiavélique:
contaminer toute la tribu avec le mal de notre société dite
"développée". En effet, les villageois sont pacifistes, tolérants, en
contact profond avec la Nature et dans un état quasi constant de pleine
conscience et de satisfaction. Sandro explique donc à son équipe comment
les déconnecter, les rendre compétitifs, matérialistes, abrutis,
insatisfaits, instillant la peur et le doute dans leurs esprits. Mais
cela est sans compter la belle Elianta, chamane en devenir qui se pose
des questions sur son rôle au sein de la tribu...
Ce qui fait le
plus défaut à ce récit, c'est un soupçon de crédibilité... A tous les
niveaux, l'improbabilité est de mise: les indigènes parlent anglais,
acceptent la venue d'inconnus sans discuter, leur donnent un pouvoir
décisionnel et se plient à toutes leurs consignes. La chamane,
évidemment la plus belle femme du village, tombe amoureuse de l'homme
brisé par le deuil - qu'elle n'aura vu que deux fois - ; les méchants
mercenaires sont très méchants et les gentils villageois sont très
gentils (et naïfs). Même si les idées évoquées par le personnage Sandro
quant à notre société malade (hyper-consommation, individualisme,
déconnexion du "Grand Tout" de la Nature, violence, jugement,
comparaison et compétitivité...) sont évidemment justes, il n'empêche
que placées dans ce contexte narratif, elles en deviennent risibles et
perdent leur pertinence dans un roman à visée "philosophique"
(importance des guillemets !).
Le thème est donc rendu accessible à
toute personne fréquentant peu les livres de développement personnel.
Sauf que, d'un point de vue purement littéraire, ce roman est maladroit,
naïf et décevant.... Mais peut-être est-ce dans l'air du temps que
cette superficialité du développement d'idée ? Le livre donne presque
l'impression d'être en lui-même le produit de ce qu'il dénonce... même
si l'on ne doute pas de la bienveillance et de la sincérité de son
auteur, bien entendu.
Chronique par Virginie