S’il
a toujours aimé puiser dans son propre vécu et ses observations pour
pimenter ses bandes dessinées humoristiques, Riad Sattouf a modifié son
dosage pour son nouveau livre : L’Arabe du Futur se présente clairement
comme une autobiographie, on y sourit, mais on y rit moins qu'à
l’accoutumée.
L’auteur, né en 1978, d’une mère bretonne et d’un
père syrien, offre à lire un récit sans concessions de son enfance au
Proche-Orient. Avec cette narration limpide qu’on lui connaît, jamais
avare en anecdotes cocasses, ni en humour caustique, c’est aussi un
portrait simultanément candide, peu flatteur et attachant de son père
qu’il dresse dans ce premier tome. Cet homme très paradoxal aura
entraîné avec lui femme et enfant dans la Libye de Kadhafi, puis la
Syrie d’Hafez Al-Assad, entre 1978 et 1984. Un contexte souvent
inconfortable, hallucinant, parfois cruel et des souvenirs aussi visuels
que tactiles, sonores et olfactifs... Ah, la bonne odeur de sueur de
ses tantes !
En mars 2011, alors que l’auteur planchait sur les
bases de son projet, le régime de Bachar el-Assad choisissait la voie
des armes pour faire face à une vague de contestations en Syrie. A
l’autofiction passée et tournée en dérision allait se mêler une urgence
au présent pour éviter la tragédie : celle de contribuer à ce que les
membres de sa famille restés à Homs puissent se réfugier en France. Cet
épisode et ses complications feront l’objet du troisième et dernier
volume prévu.
Riad Sattouf mène aujourd’hui une double carrière, celle
de cinéaste (Les Beaux Gosses, Jacky au royaume des filles) s’étant
adjointe à celle d’auteur de bandes dessinées. Après nous avoir fait
bien rire avec Les pauvres aventures de Jérémie ou Pascal Brutal, ses
créations de papier prennent avec L’Arabe du Futur un nouveau virage
convaincant, malgré quelques longueurs à mon sens inutiles.
Chronique par Joachim