BD : Les enfants de Sitting Bull

Auteur : Baudoin
Editeur : Gallimard (Bayou)


"Avec mon frère Piero, on écoutait Jean, notre papa, qui nous racontait la vie de son papa, Félix. On ne savait pas si tout était vrai, on n'osait pas demander au grand-père, sa barbe blanche et ses yeux transparents nous impressionnaient beaucoup trop. Mais, bien plus tard, on a fait des recherches, on a questionné des oncles, des tantes. Et la saga de Félix s'est confirmée, avec des compléments d'aventures encore plus extraordinaires."

Avec Les enfants de Sitting Bull, Edmond Baudoin équilibre l'hommage à ses aïeux, plus de vingt ans après avoir consacré une bande dessinée à son grand-père maternel, John Carney (Couma acò, 1991, réédité à l'Association). Il évoque même le souvenir d'un repas familial d'hiver, où le dialogue entre les deux vieillards ne passait pas. Mais au-delà de cette anecdote, c'est surtout de voyages dont il est question dans ce livre, puisque Félix fût très jeune enrôlé comme mousse sur un navire et sa vie fût parsemé d'expériences très variées. On le trouvera manœuvre sur le canal de Panama, chercheur d'or, travaillant pour Buffalo Bill, croisant la route de Sitting Bull, ouvrier à la construction du pont de Brooklyn, s'engageant dans la marine des Etats-Unis, militaire d'infanterie à Antibes...

Comme d'habitude, on sent beaucoup de sincérité dans le propos. Baudoin s'interroge sur les mystères laissés par un tel parcours de vie et n'enjolive pas forcément le tableau. L'album est aussi une opportunité pour l'auteur de se questionner sur la condition du peuple indien... et - comme d'habitude - sur lui-même, ne se voilant pas la face en évoquant un de ses propres moments de lâcheté, une promesse non tenue.

Beaucoup de sincérité aussi dans le traitement (très fouillis), parfois au détriment d'une fluidité de lecture, alternant silences et pavés de textes manuscrits, noir et blanc et couleur, trait réaliste et coups de pinceaux expressionnistes, incorporant des scans de documents et des photos (parfois repeintes)... avant de terminer sur un épilogue dessiné à la manière d'une BD américaine des années 1950.

Pas le meilleur Baudoin, loin de là, mais ceux qui suivent sa bibliographie resteront touchés par ce "livre de plus" qui diffère quand même encore des autres. 

Chronique par Joachim


P.S. : L'auteur-dessinateur avait déjà rendu un premier mini-hommage à Félix dans la "patte de mouche" Made in U.S. (à l'Association).

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