Editeur : Dupuis
En matière de détournement de codes et autres clichés d’heroic fantasy, Lewis Trondheim et Joann Sfar avaient fait fort en lançant, en 1998, la série tentaculaire et multi-dessinateurs Donjon (chez Delcourt). Une prolifique production qui aboutit à une baisse de bonnes idées après 2006 (et les excellents Après la pluie et Des soldats d’honneur), puis à l’absence de nouveaux titres Donjon depuis 2009.
Trondheim continue néanmoins son exploration du genre en solo avec Ralph Azham, les aventures d’un anti-héros se présentant sous la forme d’un canard au bec bleu. Attention : cette fois, la série n’est plus
composée de récits complets mais de volumes qui se suivent (à un rythme de parution rapide). Vous savez désormais ce qui vous attend si vous mordez à l’hameçon. Le récit étant quelque peu déstructuré,
alambiqué, improvisé au fur et à mesure, il devient assez difficile et inutile d’en faire un résumé.
A défaut de grandes nouveautés, les ingrédients qui plaisent chez Trondheim sont là : son dessin synthétique et animalier s’est même un peu aguerri (sans oublier les décors architecturaux, qui deviennent
plus fouillés, et les belles couleurs à l’aquarelle de Brigitte Findakly), ses dialogues humoristiques font mouche et le récit est imprévisible. Vouloir se surprendre soi-même en cours de réalisation
pour s’assurer de dérouter le lecteur est une bonne technique quand on a les dons de l’improvisation et de savoir retomber sur ses pattes.
Trondheim les possède, mais il use cependant de certaines facilités sous prétexte qu’il s’agit d’humour et d’heroic fantasy : quand la magie survient bien inopinément, le rocambolesque devient un chouïa
décevant.
D’autre part, malgré la diversité de personnages, peu d'entre eux s'avèrent - au stade du 4e tome - aussi charismatiques et attachants que Herbert ou Marvin (Donjon) ou encore Lapinot, voire Richard (cf. ici). En conclusion : du Trondheim divertissant mais, selon nous, pas indispensable... bien qu'il y ait du potentiel à développer avec le magicien atypique Yassou et les deux nouveaux protagonistes féminins qui apparaissent dans Un caillou enterré n'apprend jamais rien.
Chronique collective de la rédaction Asteline