Editeur : Sandawe
Dessinateur de presse surdoué (sévissant dans l'hebdomadaire belge Le Vif et le journal L'Echo), Nicolas Vadot poursuit aussi son petit bonhomme de chemin dans le neuvième art, y abordant des thématiques inhabituelles avec un ton très personnel et décalé (cf. notre chronique à propos de son album Neuf mois). Pas étonnant que l'auteur réponde présent à l'initiative novatrice de Sandawe, dont le concept permet aux internautes de financer des projets de bandes dessinées et de se sentir ainsi un peu éditeurs, un peu commerciaux et surtout actionnaires.
Avec Maudit Mardi, Vadot nous invite à nouveau dans le monde introspectif de l'humain. Celui-ci s'appelle Achille. Isolé sur Skellington*, son île, il est persuadé qu'il ne peut mourir qu'un mardi et que, par conséquent, six jours sur sept, il est indestructible.
Une catastrophe naturelle viendra le bousculer dans son inertie contemplative, l'handicapant physiquement au passage. Ce choc le poussera à traverser les océans pour rejoindre la mégapole Hawkmoon*, dans laquelle vit son amour d'antan, Rebecca.
S'ouvrant sur de très belles trouvailles visuelles autour des pieds, l'histoire sera ponctuée de diverses scènes oniriques particulièrement réussies. Je suis en revanche étonné que l'auteur, malgré plusieurs ouvrages de BD à son actif, nous serve des personnages aux physionomies si quelconques (un comble pour un caricaturiste) et aux proportions hésitantes. Ses découpages sont parfois bancals dans une alternance de cases trop grandes, fort vides pour ce qu’elles ont à représenter, et d'autres, trop petites. Notons encore la forme des onomatopées et le type de couleurs numériques qui jurent carrément avec le trait manuel et charbonneux.
En compensation de ces inégalités graphiques, le scénario, avec les thèmes de la phobie, de la vulnérabilité-invulnérabilité et de l'amour en toile de fond, vient heureusement rattraper le coup. Un bon moment de lecture, mais on sent Vadot capable de faire mieux.
Chronique par Jean Alinea