ROMAN : La Maison de l'Âme

Auteur : Chantal Deltenre
Editeur : Maelström ReEvolution



Si nous venait l’idée d’imaginer un autre titre pour La Maison de l’Âme, peut-être pourrait-on l’emprunter à l’auteur Antonio Muñoz Molina et à son livre Le Royaume des voix. Autre hommage à la mémoire… Oui, La Maison de l’Âme est un roman de voix. 

Rencontre improbable entre Stefan, un ethnologue roumain, et Claire, une journaliste parisienne. Hésitation. Puis conviction. Celle de partir là-bas, dans cette Roumanie post-Ceausescu pour recueillir le témoignage de « démolis », ces victimes de la systématisation qui consistait à raser des maisons rurales pour reloger ses habitants dans des blocs, constructions urbaines aux aménagements très relatifs. Claire donne la parole aux démunis de l’ancien régime, forcés à quitter leurs maisons, à les détruire eux-mêmes. En collectant ces témoignages, en faisant place à la mémoire des autres, c’est aussi la sienne qu’elle libère. C’est aussi son chemin propre qu’elle effectue, plongée dans ce village blessé, où persiste farouchement le rituel de la maison de l’âme, cette maison des défunts que l’on aménage par le biais de dons et d’offrandes faits aux amis, parents ou gens de passage…

Avec beaucoup de délicatesse, Chantal Deltenre nous fait prendre un chemin qui n’est aujourd’hui plus beaucoup emprunté, levant le voile sur un pan mal connu de l’Histoire. Sans nous submerger de connaissances sociopolitiques, elle distille subtilement les faits et leur dimension émotionnelle, dans un style fluide, épuré, juste. Rien n’encombre la lecture. Touchant mais sobre, ce livre s’installe en nous avec naturel et beaucoup d’authenticité. Et nous offre un regard respectueux sur des âmes belles, dans toute leur dignité.

Roman de compréhension, d’écoute, d’introspection, d’ouverture, d’évolution… où ce qui a été perdu se retrouve un peu, beaucoup. Même les âmes.

Un prix Rossel des Jeunes amplement mérité. 

Chronique par Virginie