Joachim Regout : Parallèlement au Chat, vous avez toujours aimé diversifier vos activités. On vous a vu à la TV belge, puis française ; à la radio ; vous vous êtes consacré à la littérature jeunesse avec Le fils du Chat ; on vous a vu en directeur de collection ; … Vous envisagez de continuer ainsi à diversifier votre carrière ?
Philippe Geluck : Je n’ai pas de plan de carrière, hormis peut-être une éthique - pour employer un grand mot -, une décision de ne faire que des choses qui me passionnent, qui soient créatives, drôles et jamais en contradiction avec ce que je suis profondément. J’ai pu réaliser mes rêves de môme qui étaient de devenir comédien et de dessiner.
La vie se construisant, d’abord en couple, puis avec des enfants, ça a réorienté des choix professionnels. Si je dois me retourner sur le chemin parcouru, les grandes choses qui me sont arrivées par une proposition de quelqu’un, de la radio, de la télé, d’un journal etc. Je ne m’étais jamais mis comme objectif d’aller faire des trucs à la télévision française. Ce sont Drucker et Rucquier qui m’ont un jour appelé. On m’a proposé de créer un personnage pour Le Soir. On m’a proposé de faire des émissions pour enfants à la RTBF. Quand j’ai de moi-même proposé mes dessins à des journaux, généralement on me les refusait. Même quand j’avais proposé de faire Le Chat à Casterman, au départ ils m’ont dit non. Par la suite j’ai insisté. Le seul projet que j’ai piloté moi-même depuis le début c’est la grande expo. Et encore, c’était une suggestion de Vincent Baudoux qui m’avait dit "Il faudrait faire un truc pour les vingt ans du Chat". Et je dois faire gaffe, car j’ai failli me lancer dans un projet d’animation, avec des sketches juxtaposés etc. Un truc qui m’aurait bouffé la vie. J’ai euthanasié ce projet dans l’œuf et je m’en félicite. Déjà que je fais trois ou quatre métiers à la fois, ce n’est pas la peine d’en faire six, non plus. J’ai arrêté chez Drucker, je continue chez Rucquier (radio et télé), et puis je continue à dessiner. Je n’ai pas un grand chantier en cours.
A ce propos, êtes-vous encore directeur de la collection "C’est pour offrir" chez Casterman ?
Non, je dois rester honnête avec moi-même et avec les autres : j’avais accepté parce que j’aimais l’idée de pouvoir mettre un petit coup de projecteur sur des jeunes, de pouvoir donner leur donner leur chance. Mais c’est un vrai boulot en soi et je n’en avais pas le temps. Même si je ne peux plus m’en occuper, la collection vit toujours, mais au ralenti. On la réveille occasionnellement pour un Jean-Luc Fonck ou un autre projet qui cadrera très bien avec le reste de la ligne éditoriale.
D’une part, vous recevez humblement les honneurs lors de votre expo en prétendant que "Ce ne sont finalement que des gamineries", d’autre part vous semblez savoir ce que vous valez en comparaison de la plupart des humoristes français, que vous trouvez le plus souvent médiocres. Philippe Geluck, ne seriez-vous pas un faux modeste ?
J’essaie de faire sérieusement mes gamineries. J’ai une très haute opinion de mon métier, mais je ne voudrais pas me prendre au sérieux et affirmer que je suis quelqu’un d’important dans la pensée post-moderne du troisième millénaire. Il faut remettre les choses à leur place : ce ne sont que des gags. Maintenant chacun les reçoit comme il veut. Si quelqu’un veut faire une thèse d’université sur mon travail, c’est formidable ! mais je n’ai pas pour autant l’impression de faire un métier qui soit là pour susciter des thèses ou des vocations de philosophe. Ce n’est pas de la peinture. Ca reste dans un domaine assez léger, du divertissement. Pour en venir à l’autre partie de votre question, mon jugement sévère que je peux avoir sur certains humoristes : oui, parce que je suis quelqu’un d’exigeant avec moi-même et que je m’arroge du coup le droit de l’être avec les autres. Quand je vois des trucs vulgaires, pas drôles, ça me déplaît. Je trouve que c’est indigne du métier.
Merci, Philippe Geluck.
Philippe Geluck : Je n’ai pas de plan de carrière, hormis peut-être une éthique - pour employer un grand mot -, une décision de ne faire que des choses qui me passionnent, qui soient créatives, drôles et jamais en contradiction avec ce que je suis profondément. J’ai pu réaliser mes rêves de môme qui étaient de devenir comédien et de dessiner.
La vie se construisant, d’abord en couple, puis avec des enfants, ça a réorienté des choix professionnels. Si je dois me retourner sur le chemin parcouru, les grandes choses qui me sont arrivées par une proposition de quelqu’un, de la radio, de la télé, d’un journal etc. Je ne m’étais jamais mis comme objectif d’aller faire des trucs à la télévision française. Ce sont Drucker et Rucquier qui m’ont un jour appelé. On m’a proposé de créer un personnage pour Le Soir. On m’a proposé de faire des émissions pour enfants à la RTBF. Quand j’ai de moi-même proposé mes dessins à des journaux, généralement on me les refusait. Même quand j’avais proposé de faire Le Chat à Casterman, au départ ils m’ont dit non. Par la suite j’ai insisté. Le seul projet que j’ai piloté moi-même depuis le début c’est la grande expo. Et encore, c’était une suggestion de Vincent Baudoux qui m’avait dit "Il faudrait faire un truc pour les vingt ans du Chat". Et je dois faire gaffe, car j’ai failli me lancer dans un projet d’animation, avec des sketches juxtaposés etc. Un truc qui m’aurait bouffé la vie. J’ai euthanasié ce projet dans l’œuf et je m’en félicite. Déjà que je fais trois ou quatre métiers à la fois, ce n’est pas la peine d’en faire six, non plus. J’ai arrêté chez Drucker, je continue chez Rucquier (radio et télé), et puis je continue à dessiner. Je n’ai pas un grand chantier en cours.
A ce propos, êtes-vous encore directeur de la collection "C’est pour offrir" chez Casterman ?
Non, je dois rester honnête avec moi-même et avec les autres : j’avais accepté parce que j’aimais l’idée de pouvoir mettre un petit coup de projecteur sur des jeunes, de pouvoir donner leur donner leur chance. Mais c’est un vrai boulot en soi et je n’en avais pas le temps. Même si je ne peux plus m’en occuper, la collection vit toujours, mais au ralenti. On la réveille occasionnellement pour un Jean-Luc Fonck ou un autre projet qui cadrera très bien avec le reste de la ligne éditoriale.
D’une part, vous recevez humblement les honneurs lors de votre expo en prétendant que "Ce ne sont finalement que des gamineries", d’autre part vous semblez savoir ce que vous valez en comparaison de la plupart des humoristes français, que vous trouvez le plus souvent médiocres. Philippe Geluck, ne seriez-vous pas un faux modeste ?
J’essaie de faire sérieusement mes gamineries. J’ai une très haute opinion de mon métier, mais je ne voudrais pas me prendre au sérieux et affirmer que je suis quelqu’un d’important dans la pensée post-moderne du troisième millénaire. Il faut remettre les choses à leur place : ce ne sont que des gags. Maintenant chacun les reçoit comme il veut. Si quelqu’un veut faire une thèse d’université sur mon travail, c’est formidable ! mais je n’ai pas pour autant l’impression de faire un métier qui soit là pour susciter des thèses ou des vocations de philosophe. Ce n’est pas de la peinture. Ca reste dans un domaine assez léger, du divertissement. Pour en venir à l’autre partie de votre question, mon jugement sévère que je peux avoir sur certains humoristes : oui, parce que je suis quelqu’un d’exigeant avec moi-même et que je m’arroge du coup le droit de l’être avec les autres. Quand je vois des trucs vulgaires, pas drôles, ça me déplaît. Je trouve que c’est indigne du métier.
Merci, Philippe Geluck.