BD : Alix fac-similés / Alix Senator

Auteur : Jacques Martin
Editeur : Casterman



Alix fait partie, au même titre que Tintin et Corto, du fond de commerce de Casterman, ces classiques indémodables qui n’en finissent pas d’être réédités sous divers formats et dont le succès intemporel permet à l’éditeur de se lancer dans des paris plus risqués.

Rien d’étonnant dès lors à voir paraître une collection de fac-similés d’Alix (couverture non pelliculée, dos toilé, papier épais, coloris aux tons chauds), dans la même veine que ceux de Tintin. On pourra s’étonner que cette série commence par le numéro 4. C’est dû tout simplement au fait que les trois premiers épisodes étaient parus dans la prestigieuse Collection du Lombard. On pourra le regretter… ou pas. Parce que La Griffe Noire est un album-clé dont le ton, avec son mystérieux criminel masqué, sa sombre histoire de vengeance, et ses péripéties hallucinantes, fait penser à une Marque Jaune version antique.

Dans La Griffe Noire, Jacques Martin a définitivement installé son style et cet album inaugure la meilleure période de l’auteur, jalonnée d’albums incontournables comme Les Légions Perdues, Le Dernier Spartiate, Le Dieu Sauvage ou Iorix le Grand. Les redécouvrir permet aussi, malheureusement, de mesurer le fossé (le gouffre) qui sépare le style de Jacques Martin à son sommet de ce qu’ont pu produire ultérieurement la plupart de ses interchangeables émules, à l’exception notoire de Gilles Chaillet dans les premiers tomes de Xan Jhen.

Néanmoins, le célébrissime héros fait aujourd'hui un retour inattendu sous la plume de Valérie Mangin et les pinceaux de Thierry Demarez : leur Alix Senator propose non seulement un personnage vieilli, mais un revirement complet de style, plus proche de cet autre péplum en bandes dessinées qu'est Murena (la saga de Delaby et Dufaux, chez Dargaud). Une approche efficace, qui n'omet pas non plus de trouver une cohérence avec de grands albums classiques signés Martin, comme Le Tombeau Étrusque.

L'action se déroule en l'an 12 avant Jésus-Christ. L'empereur Auguste charge son vieil ami le sénateur Alix Gracchus d'enquêter discrètement sur les assassinats de celui qui devait lui succéder et d'un grand pontife de Rome.

L'intrigue initiée dans ce premier tome, Les Aigles de sang, ne trouvera sa résolution qu'en fin du troisième, titillant notre (im)patience.

Chronique par Jean Alinea