ROMAN : Mort de Bunny Munro

Auteur : Nick Cave
Editeur : Flammarion
 
   En 1989, Nick Cave publiait son premier roman, Et l’âne vit l’ange. Il y dépeignait le sort d’un pauvre bougre, muet et illuminé, au sein d’une communauté autarcique malsaine et sectaire, faite de fous et d’âmes perdues. Un roman halluciné, dense, complètement surprenant, qui nous happait littéralement dans son univers à la fois mystique et sombre, fascinant et repoussant. En clair, un roman audacieux, alternatif et singulier.
 
Et voilà notre sombre héros du rock revenu aux lettres avec la Mort de Bunny Munro. Moi qui suis fan du musicien, je ne pouvais que me réjouir. Les premières pages nous mettent directement dans le bain : Bunny Munro est un coureur de jupons, est souvent en érection, vend des crèmes de beauté à domicile, vient de perdre sa femme qui s’est suicidée en lui laissant la charge de leur petit intello de fils (Bunny Junior). Bunny Munro est instable, se réfugie dans l’alcool et a comme repère existentiel principal l’orgasme, qu’il cherche à tout va, seul ou accompagné.
 
Comme déjà, Nick Cave s’attache à un pauvre hère paumé, qui nous dégoûte ou nous fait pitié, qu’on ne peut se résoudre à détester vraiment. Et pourquoi ? Parce que dans toute sa misère, il est quand même en quête de rédemption. Rédemption dont il prend peu à peu conscience lorsque tout le reste se délite.
 
Malheureusement, l’obsessionnel tue parfois l’obsessionnel et, dans le cas de ce roman, le côté répétitif de l’obscénité propre ou figurée finit un brin par lasser. On est dans un équivalent littéraire du road-movie, avec un homme perdu qui refuse de rentrer chez lui et avance à tâtons en provoquant le malheur sur son passage. C’est intéressant, oui. Dommage qu’à trop vouloir rendre son personnage fort, Nick Cave l’a rendu trop caricatural. Bunny Munro n’avait peut-être pas besoin d’être réaliste… juste un peu plus crédible, sans doute. 
 
Déception, donc. Aurais-je abdiqué si l’auteur n’avait pas été Nick Cave ? Peut-être… On ne peut pas toujours nier sa subjectivité. Mort de Bunny Munro n’est pas à mettre entre toutes les mains, c’est sûr. Les miennes étaient pourtant grandes ouvertes… 
 
Chronique par Virginie
 
Pour les curieux, le site du roman où l’on peut voir et écouter Nick Cave lire des extraits de son roman : http://www.mortdebunnymunro.fr/