ROMAN : My Absolute Darling

La parution au format poche (chez Gallmeister) de ce My Absolute Darling nécessitait-il de poster une chronique de plus sur la toile à propos de ce bouquin ? Comme nous n'en avions pas parlé ici lors de sa première sortie et parce que je n'ai pas croisé beaucoup d'avis mitigés, j'ai l'impression que oui. Ce phénomène littéraire américain, puis mondial, a en effet surtout suscité des exclamations pour le moins enthousiastes de nombreux journalistes et autres "influenceurs", mais aussi des dégoûts profonds chez certains lecteurs sensibles. 

Sans trop en dévoiler, l'histoire raconte la vie d'une adolescente surnommée Turtle, vivant dans une maison isolée dont n'émane pas vraiment de "bonnes ondes", même si située à proximité de la mer et des forêts.
Si elle a bien une vie scolaire (pour le moins compliquée) et rend de régulières visites à son grand-père, le reste de son univers se réduit à la relation avec son paternel, qui l'éduque seul dans ce lieu en décrépitude. L'homme est un costaud charismatique, manipulateur, cumulant un intérêt pour la philosophie classique (ce qui m'a paru moyennement crédible, vu son niveau de langage), une rudesse extrême et des vices multiples... jusqu'aux plus inavouables. Usant de moquerie et de violence pour endurcir sa fille, il en fait progressivement une experte en armes à feu et aux techniques de survie, la préparant à ce monde qu'il croit bientôt voué à l'enfer post-apocalyptique. Entre l'attachement au paternel malgré ses abus et le besoin irrépressible de fuir pour préserver ce qui lui reste d'âme, Turtle est déchirée.

I
névitablement, par son côté "trash"
(inadaptable en film) et cette immersion dans la tête confuse d'une héroïne malmenée, mon esprit a été marqué. Mais qu'ont lu auparavant les personnes qui crient déjà au "classique de la littérature contemporaine" ou au "roman le plus puissant depuis des années" ? En matière de portraits psychologiques mêlé au suspense, Stephen King (pour citer un seul exemple archi connu) fait mieux, l'imaginaire horrifique en prime. Si on peut être impressionné par le fait qu'il s'agisse d'un premier roman pour Gabriel Tallent, je suis  quand même surpris que l'impasse soit faite sur ces défauts : à de multiples reprises, on perd le fil de qui parle et de qui est décrit ; des dialogues laconiques ou grossiers sont évocateurs de non-dits, mais jouent aussi souvent les prolongations inutiles ; certaines répliques plus riches semblent en revanche improbables dans certaines circonstances tragiques ; si pléthore de documentation il y a, on ne la sent pas toujours harmonieusement intégrée, les informations glanées (sur les armes à feu, la survie en pleine nature sauvage, l'aspect médical, etc.) donnant parfois l'impression d'étalage, parfois même de collage saugrenu dans le rythme d'une action. Rien toutefois qui permette de dire que My Absolute Darling n'est pas un roman noir "efficace" pour qui tient à se nourrir de ce type de littérature. Mais si bien camper des personnages et des atmosphères glauques peut créer un récit provocateur, à l'effet "coup de poing" pour le public, ça ne suffit pas pour offrir un scénario original, et encore moins un chef-d’œuvre.

Une déception pour ma part.

Chronique par Joachim