Editeur : Albin Michel
Pierre, un trentenaire dépressif, décide de tout abandonner de son ancienne vie pour se réinventer ; laissant derrière lui femme, famille et amis. Le problème avec cette nouvelle vie, c’est que les gens ont tendance à mourir autour de lui ; et pas vraiment de mort naturelle. Pierre essaie d’aller de l’avant alors qu’un élément de son passé vient systématiquement le freiner : son ex-psychologue, devenu depuis son harceleur et l’oiseau de mauvais augure de ses moments heureux. Dans un récit qui débute par sa fin, et où le dénouement est d’emblée annoncé comme incertain, on découvre que la vie de Pierre n’était peut-être pas aussi plate qu’il avait pu en juger avant sa métamorphose.
Célèbre pour ses romans noirs, Maxime Chattam ne déroge pas à la règle avec Le coma des mortels… ou en tout cas, on sent que c’est son intention. Toutefois le cynisme singé du personnage principal le rend assez superficiel et peu subtil. Il répand ainsi ses idées sombres sur la vacuité des choses avant de plonger lui-même dans la mièvrerie à la même occasion. Le style d’écriture manque de naturel, oscillant entre des figures de style, un langage familier et des références trop précautionneusement choisies pour faire écho.
Toutefois, le roman ne manque pas de rythme et, au fur et à mesure que les autres personnages font leur apparition, on est piqués de curiosité. Car l’auteur distille ça et là des éléments propres au genre qu’il maîtrise. Et comme pour tout thriller qui se respecte, nous voilà happés par le besoin compulsif de comprendre les bribes d’énigme qui ont été déposées sur notre chemin, d’y donner du sens. On en oublie alors presque que ces personnages "secondaires", qui sont décrits comme des êtres originaux au destin funeste, manquent tragiquement d’authenticité.
Cette lacune imprègne finalement l'ensemble du livre : on sent l'effort, latent, de vouloir s’éloigner des sentiers battus, de créer des personnages hors du commun, de formuler des vérités profondes. Le résultat est somme toute mitigé et on reste sur une impression que les situations intéressantes, les caractéristiques de certains personnages, l’histoire même du protagoniste… ont été avortées au profit d’éléments moins pertinents, d’une volonté de ne surtout pas s’enliser dans le thriller.
Pour éviter une fin à l’américaine, une fin qui répondrait à toutes nos questions, Maxime Chattam choisit un dénouement alambiqué, à l’image du roman, qui nous laisse nous demander si le personnage principal ne sort pas d’une hallucination de 400 pages. Difficulté de l'auteur d'aboutir dans sa propre réflexion ou ambition de nous perdre volontairement ? A vous de juger.
Chronique par Romina Rinaldi