Editeur : Dargaud
C'est
surtout de l'autre côté de l'Atlantique qu'est le plus célèbre Jean-Jacques
Audubon, naturaliste de la première moitié du 19e siècle. S'il enflamme
encore l'imagination et les esprits, c'est grâce à son projet fou, celui de
répertorier, peindre tous les oiseaux d'Amérique. Immigré aux Etats-Unis à 18
ans pour fuir la circonscription napoléonienne, Audubon, devenu John James,
tente d'abord de suivre les traces de son père dans le commerce... mais force est
de constater que c'est tout sauf sa voie. Sa passion est ailleurs : dans le vol
des oiseaux. Il voyagera ainsi pendant des années et dans des contrées parfois
hostiles, laissant derrière lui femme et enfants, afin de poursuivre son rêve.
Les
auteurs de cet album retracent son parcours et ses mésaventures, ses
obsessions, sa sensibilité. Artiste autant qu'ornithologue, ses peintures ne
lui valurent pas d'emblée le crédit du monde scientifique. Déterminé à faire
figurer la vie, la couleur, dans ses représentations, jamais il ne se contenta
de la description rationnelle d'organismes figés, leur préférant de
stupéfiantes mises en scène. Naturaliste, oui, mais aussi chasseur, ce qui,
paradoxalement, l'amena à exterminer des centaines d'espèces. Parcours atypique
d'un aventurier insolite, Sur les ailes
du monde, Audubon est graphiquement réaliste, aux couleurs de terre
et de feuillage, de coucher de soleil et de nuit sombre. Mais l'onirisme s'y
insinue de temps à autre, quand l'univers mental du héros frôle dangereusement
les limites de la folie.
Malgré
quelques longueurs, on tient dans les mains un album réussi, qu'on n'aurait pas
de mal à voir figurer auprès des ouvrages de Thoreau et London. Nous renvoyant
vers des préoccupations écologiques alarmantes, nous rappelant la beauté de
cette nature qu'on oublie tant de chérir, Audubon, aujourd'hui encore, nous
invite aux grands espaces. Sur les ailes du monde.
Chronique par Virginie