Editeur : Flammarion
L’académisme
universitaire a souvent conforté l’a priori populaire que “l’art de
penser” était barbant, réservé à une “élite” intellectuelle férue de
verbiages abstraits et autres tergiversations autour de concepts
désincarnés. N’est-ce donc que lorsqu’elle aboutit sur les
mathématiques, sur une idéologie politique ou encore sur des thérapies
(psychanalyse, …) que la philosophie servirait à quelque chose ?
N’est-elle utile dans nos vies qu’en sacrifiant son nom et son essence ?
Il
est heureux de voir une série d’essayistes et autres personnalités lui
redonner sens aux yeux d’un large public. Les éditions Flammarion ont
encore dernièrement fait paraître plusieurs ouvrages de synthèse ou de
vulgarisation, parmi lesquels ceux de “superstars” (contestées) de la
philo : Cosmos de l’hédoniste Michel Onfray, premier tome d’une
trilogie qui lui semble être l’aboutissement et un nouveau départ pour
sa bibliographie ; ou encore Sagesses d’hier et d’aujourd’hui de
l’ex-ministre Luc Ferry, qui y présente une anthologie de la
philosophie, en justifiant ce qu’il trouve de grandiose chez Platon,
Kant ou Hegel…” (une brique de 815 pages, quand même).
Certains
reprochent au premier d’être un faux libertaire, au second d’être un
obligé du pouvoir et les croyants à tous deux d’être défenseurs de
l’athéisme. Pour ma part, j’ai préféré choisir de parler d’un livre à la
visibilité plus discrète, au contenu moins polémique et qui dépoussière
pourtant - et peut-être de façon encore plus efficace - l’image et la
définition erronée de ce qu’est la philosophie.
Fabrice Midal est persuadé que chacun de nous peut participer à relever les grands défis de notre société. Cela commence en retrouvant notre capacité d’attention qui s’est étiolée à un point préoccupant (la technologie n’aidant pas sur ce plan). Il préconise d’ailleurs, en parallèle de la philosophie, une pratique de la méditation qui ne se limite pas à une technique orientale et de bien-être. Savoir questionner le monde qui nous entoure, avec sa violence économique, questionner notre propre humanité, à la lumière de Socrate, Spinoza, Montaigne ou Heidegger, différencier l’éthique de la morale, faire l’expérience de la compassion, de l’amitié réelle… Même si l’on pense avoir déjà lu sur ces sujets, ce livre étonne, se lit fluidement, l’écriture étant particulièrement claire (et bienveillante), les extraits choisis judicieux. L’envie de souligner ou de "post-iter" des passages pour y revenir plus tard est aussi fréquent qu’irrépressible.
Au
final, un superbe texte, qui incite à aller plus loin dans la
découverte des philosophes (car on ne peut résumer chacun d’eux à
quelques citations), mais surtout dans l’expérience plus consciente de
Vivre avec un grand V. Essentiel.