BD : Valentina

Auteur : Crepax
Editeur : Actes Sud / l’an2

(Pour "Public averti")

En créant (en 1965) le personnage de Valentina Rosselli, jeune garçonne élégante, aux allures de Louise Brooks, Guido Crepax dénotait dans le paysage des productions érotiques, dont les protagonistes étaient jusque là plantureuses et peu cérébrales. En lui attribuant le métier de photographe, l’auteur s’assurait de pouvoir lui faire vivre des aventures dans divers milieux et la faire évoluer au gré de ses inspirations (historiques, souvenirs personnels, influence du cinéma, de la mode, des contes d’enfance…). En la faisant vieillir avec lui, elle allait devenir tour à tour épouse (de Neutron, alias un certain Philippe Rembrandt), mère, maîtresse d’hommes multiples, victime de tragédies (dont le décès de son petit garçon dans un attentat), un être tout en profondeur sans rien perdre de sa sensualité… jusqu’en 1996 où il réalisa un ultime épisode.

La longiligne Valentina aura longtemps été un fantasme d’intello, tout en plaisant à certaines femmes parce que sa psychologie était fouillée, dotée de tiraillements complexes et de pulsions sadomasochistes. Malgré les apparences d’une héroïne libérée et une tentative de représenter la psyché féminine, Valentina n’en demeurait pas moins une créature issue d’un cerveau masculin et d’une époque qui demeurait machiste. Aujourd’hui, cette bande dessinée attire toujours un public féru d’érotisme et de X “vintage”, mais également les étudiants et autres spécialistes de bandes dessinées, qui voient - à raison - en ces pages des structures narratives audacieuses et toujours intéressantes.

Les éditions de l’an2 ont l’excellente idée d'entamer une réédition des histoires (courtes) de Valentina, en les regroupant pour l'instant sous la forme de deux volumes au format roman, comportant des notes rédigées par Luisa et Antonio Crepax (respectivement épouse et fils de Guido).


Deux grands crus issus du patrimoine de la BD érotique, en somme.


Chronique par Joachim