BD: Une aventure de Jeanne Picquigny: La paresse du panda



Auteur : Bernard

Editeur : Casterman


Fred Bernard développe avec cette série une suite de romans graphiques liés mais pouvant se lire indépendamment ou dans l’ordre qu’on souhaite. Il y a quelque chose de Corto Maltese - version féminine - dans la tonalité d’aventures de Jeanne Picquigny, globe-trotteuse des Années folles, aviatrice, écrivaine, cinéaste, actrice en Amérique un temps, résistante sous l’Occupation avec son mari Eugène Love Peacock.




Dans La paresse du panda, leur petite fille et musicienne Lily ("panthère-rockeuse-pop-tribale qui aurait bouffé du folk-Art Déco" (sic)) vit une période d’arrêt d’activité, de retraite et d’investigation, trouvant dans les écrits de son aïeule matière à introspection et à inspiration. Ce sont donc deux récits en parallèle, se déroulant à des époques distinctes, que l’on suit. Touchants et très bien écrits. Extraits :


"Je crois bien que la technologie crée plus de fantômes que des milliers d’années de magie blanche ou noire. Allô, quoi ! On te parle à travers un écran, un bip t’annonce la mort d’un proche ou bien que l’on pense à toi au bout du monde. Sans diaboliser, tandis que tu joues sur ces machines, est-ce que je ne disparais pas à tes yeux et tes oreilles ?"

"En roulant des pelles à l’étranger, tu croyais briser la barrière de la langue, lily, mais tu tournais en rond."

"Tous ces gens dans l’obscurité formaient un gouffre bien plus menaçant. Se jeter dans le vide. Guetter la transe. Etre la bête traquée dans les feux d’une jeep. Désirée mais désormais grimée, je pensais éteindre mes fards.

Le public me faisait parfois songer à des touristes en safari. Filmant avant de regarder. Photographiant sans voir. J’espérais ne pas leur en laisser le temps. Ne pas faire illusion, mais sensation. Couper les jambes, mais les faire danser. Arracher les cerveaux, mais les faire rayonner. Que nous nous sentions plus vivants que jamais. Eux et nous. Ensemble."

Chronique par Jean Alinea