BD : Le château des ruisseaux

Auteur : Poincelet et Bernière
Editeur : Dupuis



Dépassé mon a priori face à ce dessin assez clinique, à la fois esquissé et photographique, j’ai découvert un ouvrage subtil, nous invitant dans un centre d’aide aux toxicos. L’Apte – c’est son nom - prône une méthode par l’entraide et sans substituts. Une méthode au jour le jour, qui offre des résultats probants, même si, comme pour d’autres cures de désintoxication, seulement une minorité parviendra à rester "clean" durablement.

Vincent Bernière signe ici, au travers de son personnage principal semi-fictif, un récit documentaire basé sur des faits réels et vécus. Crus et non-aseptisés donc, mais en évitant toutefois le sensationnalisme. Vous n’assisterez pas à des crises de manque impressionnantes. Si vous voulez plus démonstratif, voyez le film Trainspotting en complément. Le château des ruisseaux présente plutôt des réunions de groupe, un ensemble de témoignages interpellants : récits de vie en dérive incontrôlée ; aveux de hontes liées aux substances – de ces hontes qui poussent à reconsommer - ; expressions de réticences et de volontés d’en sortir. C’est fort et tellement humain - un adjectif galvaudé mais approprié dans ce cas-ci, puisque la problématique peut toucher des personnes de tous milieux socio-culturels.

Appropriés, le réalisme et la finesse du trait de Frédéric Poincelet s’avèrent finalement l’être aussi. La narration se fait par succession d’images et phylactères sans cases, les propos graves étant parfois aérés par la contemplation de la nature environnante ou d’autres signes annonçant un regain d’émerveillement et d’espoir.

Un ouvrage salutaire, qui offre une prise de conscience tant pour le lecteur n’ayant jamais été confronté à l’addiction que pour un dépendant. Ce serait bien qu’il en existe une édition subventionnée par les ministères de la santé ou les mutuelles, en vue d’être largement distribuée.

Chronique par Jean Alinea


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