Auteur : Fatou Diome
Editeur : Flammarion
Betty a la trentaine inaccomplie, la curiosité facile et l'ennui grandissant. De sa fenêtre solitaire, elle observe l'immeuble d'en face, y décèle des bribes de vie chez ses voisins et pense qu'elle peut en tirer quelques leçons qui l'aideront à mettre de l'ordre dans sa propre existence.
Evidemment, il n'en est rien dans la mesure où la vie des autres finit tôt ou tard par imprégner la vôtre de ses souffrances et de ses errances. Lorsque Betty, attachée au personnage de Félicité, une vieille dame seule qui survit comme elle peut, assiste au départ de cette dernière pour une maison de retraite, tout son être se révolte et elle décide d'accompagner sa voisine dans ses instants de détresse. Une complicité attendrissante et franche s'installe entre les deux femmes. Félicité raconte et Betty écoute, éponge à émotions dont les propres manques trouvent écho dans ceux de sa compagne.
Mais la vie n'est pas un long fleuve tranquille et le dépérissement s'empare progressivement de Félicité, jusqu'à l'étape ultime qui bouleverse tous les repères de Betty. Celle-ci ne trouve alors d'autre issue que la fuite.
"Inassouvie, la vie, puisqu'elle a toujours besoin d'un horizon."
Roman sensible et empreint d'humanité, ce livre expose en pleine lumière notre rapport à la vieillesse et notre considération pour les personnes âgées. Une conception sociale qui varie énormément de l'Afrique à l'Europe. Alors que la position matriarcale est hautement estimée dans le pays d'origine de Fatou Diomé, il n'en va pas de même sur le Vieux Continent et ce manque de respect transparaît dans les anecdotes délivrées au gré des pages.
A travers le personnage de Betty s'esquisse un soubresaut, une réaction timide mais réelle face à cette situation. Comment se comporter? Que nous restera-t-il lorsque tous les fondements de notre culture auront disparu? Sommes-nous à même de mener notre propre barque sans nous référer à ce qui avait lieu avant nous?
Les souvenirs de Félicité sont les garde-fous de Betty, ils lui permettent de prendre conscience d'un passé douloureux et d'un futur à construire. Thème essentiel que cette transmission de flambeau d'une génération à une autre, en abolissant les frontières liées aux convenances sociales et à ce regard encore honteux porté sur la vieillesse.
Par cette histoire profondément humaine, Fatou Diome nous interpelle sur notre sens des responsabilités et le poids d'un héritage que nous estimons souvent trop lourd à porter, indispensable cependant à notre progression dans la vie et notre recherche du bonheur.
Le langage poétique et élégant, dansant de page en page, apporte beaucoup de fraîcheur à cet océan de gravité et illumine le récit. Indéniablement un beau roman sur notre condition humaine, forte et fragile à la fois.
Editeur : Flammarion
(270 p.)
Betty a la trentaine inaccomplie, la curiosité facile et l'ennui grandissant. De sa fenêtre solitaire, elle observe l'immeuble d'en face, y décèle des bribes de vie chez ses voisins et pense qu'elle peut en tirer quelques leçons qui l'aideront à mettre de l'ordre dans sa propre existence.
Evidemment, il n'en est rien dans la mesure où la vie des autres finit tôt ou tard par imprégner la vôtre de ses souffrances et de ses errances. Lorsque Betty, attachée au personnage de Félicité, une vieille dame seule qui survit comme elle peut, assiste au départ de cette dernière pour une maison de retraite, tout son être se révolte et elle décide d'accompagner sa voisine dans ses instants de détresse. Une complicité attendrissante et franche s'installe entre les deux femmes. Félicité raconte et Betty écoute, éponge à émotions dont les propres manques trouvent écho dans ceux de sa compagne.
Mais la vie n'est pas un long fleuve tranquille et le dépérissement s'empare progressivement de Félicité, jusqu'à l'étape ultime qui bouleverse tous les repères de Betty. Celle-ci ne trouve alors d'autre issue que la fuite.
"Inassouvie, la vie, puisqu'elle a toujours besoin d'un horizon."
Roman sensible et empreint d'humanité, ce livre expose en pleine lumière notre rapport à la vieillesse et notre considération pour les personnes âgées. Une conception sociale qui varie énormément de l'Afrique à l'Europe. Alors que la position matriarcale est hautement estimée dans le pays d'origine de Fatou Diomé, il n'en va pas de même sur le Vieux Continent et ce manque de respect transparaît dans les anecdotes délivrées au gré des pages.
A travers le personnage de Betty s'esquisse un soubresaut, une réaction timide mais réelle face à cette situation. Comment se comporter? Que nous restera-t-il lorsque tous les fondements de notre culture auront disparu? Sommes-nous à même de mener notre propre barque sans nous référer à ce qui avait lieu avant nous?
Les souvenirs de Félicité sont les garde-fous de Betty, ils lui permettent de prendre conscience d'un passé douloureux et d'un futur à construire. Thème essentiel que cette transmission de flambeau d'une génération à une autre, en abolissant les frontières liées aux convenances sociales et à ce regard encore honteux porté sur la vieillesse.
Par cette histoire profondément humaine, Fatou Diome nous interpelle sur notre sens des responsabilités et le poids d'un héritage que nous estimons souvent trop lourd à porter, indispensable cependant à notre progression dans la vie et notre recherche du bonheur.
Le langage poétique et élégant, dansant de page en page, apporte beaucoup de fraîcheur à cet océan de gravité et illumine le récit. Indéniablement un beau roman sur notre condition humaine, forte et fragile à la fois.
Chronique par Sahkti
P.S. : Lisez aussi notre chronique à propos du Ventre de l'Atlantique, par la même auteur.