Ce qui caractérise le groupe américain Mercury Rev depuis ses débuts, ce sont des ambiances qui semblent tout droit sorties de rêves et autres trips hallucinatoires.
Les deux fantastiques premiers albums - Yerself is steam et Boces - présentaient une pop-rock noisy expérimentale et psychédélique, cousine de ce que faisaient les Boo Radleys ou Ride en Angleterre à la même époque. Problèmes de substances et tensions internes aboutirent au départ forcé du chanteur David Baker. S’ensuivit un changement de cap dans See you on the Other Side, un album de transition intéressant, cherchant de nouvelles marques et davantage de maîtrise des instruments.
Avec Deserter’s song, All is dream et Secret Migration, la bande de Jonathan Donahue (aujourd'hui réduite à trois membres fixes) a offert des albums magistraux, affûtant ses sonorités lyriques sur des mélodies captivantes, tout en sachant expérimenter et surprendre à chaque fois.
Snowflake Midnight s’inscrit à la fois dans la continuité de Secret Migration, mais déroute aussi solidement par des incursions dans d’autres territoires que sont l’electro et l’ambient. Snowflake in a hot world et Butterfly’s wing qui introduisent l’album auraient d’ailleurs pu faire croire à un revirement radical. Mais la suite démontre que si Mercury Rev continue à innover et évoluer, l'ensemble gagne paradoxalement en cohérence.
Les morceaux, pris isolément, présentent pour la plupart des mélodies moins mémorables et sophistiquées que celles des trois albums antérieurs. Leur force réside toutefois dans le voyage où elles nous emmènent, dans leur danse autour d’un axe central : Dream of a young girl as a flower. D’ores et déjà, cette chanson (de près de 8 minutes) marque un nouveau grand moment de leur carrière, qu’on imagine sans peine comme un magnifique moment de concert. (N.B. anecdotique : durant les premières minutes de cette plage, j’ai cru entendre le belge Ozark Henry)
Autre temps fort, People are so unpredictable semble exhumer le Roger Waters torturé de The Wall, ainsi que du Brian Eno cuvée 1977-‘78 (avec ou sans Bowie). Eno dont l’influence plane partout dans ce Snowflake Midnight (October Sunshine sonne presque comme un hommage). L’esprit de Pink Floyd s’invite régulièrement aussi.
Hypnotisant, féérique, Snowflake Midnight est un disque qui vous emmènera dans d’autres galaxies (n’oubliez pas de redescendre).
Je le clame depuis l’écoute des premiers maxi-CD et albums, que j’avais obtenu en import des USA en 1992 : Mercury Rev est un grand groupe ! Enfin je commence à trouver des personnes qui me rétorquent qu’ils connaissent et adorent.
Chronique par Louis
P.S. : le groupe met gratuitement à disposition (il suffit de s’inscrire sur leur site) tout un album instrumental : Strange Attractor. Ce complément purement ambient me paraît nettement plus facultatif.